Exposition : 15 avril - 6 mai 2023
Vernissage : samedi 28 janvier de 18h00 à 21h00
Ouvertures :
DU SAMEDI AU DIMANCHE 10H-12h30 / 16H-18h30
sur RDV : 06.64.84.06.01 / contact@hasy.fr
De Studio Shakhari Bazar (2006) à Spolia (2010), les projets photographiques de Gilles Saussier ont en commun d’être fondés sur l’archéologie et le retour sur image. L’historienne de la photographie Danièle Méaux a écrit qu’ils étaient des voyages feuilletés, entrecroisant les époques et procédant de déplacements sucessifs et stratifiés sur des territoires liés à des événements pour faire affleurer le passé au sein du présent .Ce nouveau chantier de fouilles revisite sa collaboration passée avec le sociologue Jean- Yves Petiteau lors d’itinéraires menés à Nantes et à Saint-Nazaire (2004-2008). Comme dans Le Tableau de chasse (2010), Gilles Saussier place au centre de sa recherche artistique le montage des mots et des images et la recherche de nouvelles stratégies iconotextuelles. Exposée et/ou éditée, sa démarche reste fidèle à la logique du réemploi et des spolias architecturales: fabriquer un nouvel édifice documentaire à partir de fragments démantelés et recomposés de constructions anciennes.
En 2004, lors d’une résidence artistique dans le quartier HLM de Malakoff à Nantes, Gilles Saussier fait la connaissance du chercheur et sociologue Jean-Yves Petiteau et de sa démarche des itinéraires : une technique d’entretien en mouvement durant laquelle l’intervieweur abandonne à l’interviewé l’initiative et l’invention de son parcours et de son récit. Une collaboration inédite s’engage qui rompt avec l’habitude de J.-Y. Petiteau de faire appel pour ses itinéraires à des photographes amateurs ou de circonstances.
À l’échelle de l’estuaire de la Loire, entre Nantes et Saint-Nazaire, le chercheur et le photographe s’intéressent aux composantes les plus mouvantes et les plus précaires de la population locale (travailleurs fluviaux et sociaux, habitants des quartiers d’habitat populaire, sans papiers, sans domicile fixe, etc.) et expérimentent plusieurs itinéraires. Le premier Lui et l’histoire des miroirs est consacré à une jeune femme qui vient en aide à deux sans papiers russe dans le marais de Malakoff à Nantes (2004). Suivront en 2006 et 2007, trois itinéraires réalisés à Saint-Nazaire en mémoire d’un sans-domicile-fixe mort à la rue. Rassemblant des récits de personnes l’ayant connu depuis l’enfance ou dans la précarité, ces itinéraires déplacent les questions de l’habiter – qui est dehors, qui est dedans ? – et de l’hospitalité - comment devient-on étranger à sa propre ville ?
Durant cette collaboration, la forme des itinéraires évolue. Les rôles de l’artiste et du chercheur se redistribuent. J.-Y. Petiteau s’affirme comme le «performer » des récits de territoire enregistrés. Gilles Saussier assume le montage et la mise en page des itinéraires. Par des ruptures de temporalité, l’introduction de la photographie couleur, des prises de vue pendant et après l’itinéraire, il déplace la forme roman-photo des itinéraires. En 2021, Gilles Saussier entreprend de faire retour sur cette collaboration demeurée inachevée depuis le décès de Jean-Yves Petiteau en 2015. Il s’attache à rééditer la démarche des itinéraires en réempruntant les parcours des itinéraires réalisés il y a près de quinze ans comme un baliseur réouvre un sentier embroussaillé et gagné par la végétation. Il entreprend également de poursuivre l’expérimentation de leur forme éditoriale par de nouvelles stratégies phototextuelle qui en rupture avec la hiérarchie du rapport texte-images sous laquelle ont été jusqu’à présent publiés.
À l’occasion de cette exposition à la galerie Hasy des archives et des extraits de ce projet éditorial mené en collaboration avec le graphiste David Poullard et avec le tireur et photograveur Philippe Guilvard.
Biographie — Gilles Saussier
Né en 1965, Gilles Saussier travaille entre Arles et les Andelys (France). Photographe, il enseigne à l'École nationale supérieure de la photographie (ENSP Arles) et à L'École des hautes études en sciences sociales (EHESS Paris). Sa démarche documentaire est centrée sur la pratique éditoriale, l'expérimentation du rapport texte-image, la relecture archéologique d'événements et d'oeuvres en lien avec son corpus photographique. Elle assume l’acte photographique comme un acte performatif et collaboratif entre conceptualisme, tradition documentaire et anthropologie.